Abondance de Jakob Guanzon (Editions La Croisée)
Résumé :
« Tout ce qui comptait, c’était ce petit garçon. »
Henry et son fils Junior dorment dans leur pick-up et se lavent dans les toilettes des McDonald’s. Avant, Henry avait pourtant un toit au-dessus de sa tête, un boulot, une vie de famille et l’espoir des jours heureux. Mais l’Amérique ne pardonne pas. Henry a tout perdu et se bat pour son enfant. Demain, Henry a un entretien d’embauche. Il peut s’en sortir. Il doit s’en sortir.
Mon avis :
Henry vit en marge de la société américaine. Il fait partie des laissés pour compte. Il sort d’une peine minime de prison et ne peut donc prétendre à des emplois stables, même les plus mal-payés… son estomac est vide, ses poches aussi et il ne possède plus que sa voiture, un vieux pick-up, qui est sa maison mobile. Pourtant Henry veut s’en sortir, principalement pour son fils, Junior, qui lui n’a rien demandé. Alors de petits boulots en petites faims chez McDo, il calcule le moindre cents. Mais il y a Junior, qui le regarde, lui tient la main, le motive… il y a une promesse dans ses yeux.
Ce roman est d’une banalité mais d’une puissance incroyable. A travers des chapitres assez courts, dont chacun porte un prix en dollar, Jakob Guanzon retrace la vie de Henry, jusqu’à ce moment dans les toilettes du McDo.
De son enfance désœuvrée, père distant, mère morte trop tôt, Henry a quelques fantômes qui le hantent ; il se retrouve dans une spirale dangereuse en tout point ; il touche à tout, alors, drogue, alcool, enchaîne les mauvaises fréquentations et plonge dans les jours sans intérêt, jusqu’à sa rencontre avec Michelle, dont il tombe amoureux.
Tout à leur amour, à la naissance de leur fils, vivant chichement dans un mobile-home, ils subissent plus qu’ils ne vivent. Henry tombe, prend cinq ans de prison et il a tout perdu. Sa femme, sa vie, son travail… il est à l’abandon, seul avec son fils.
Jakob Guanzon raconte, doucement, les personnes en marge, les invisibles de la grande Amérique… ceux qui n’existent pas, qu’on ne veut pas voir…
Il prend à témoin le lecteur, déroule la vie, l’ordinaire, l’amour d’un père, les yeux brillants d’admiration d’un enfant, celui dédaigneux d’un passant, d’un inconnu, les toilettes sordides, le hamburger le moins cher, souvent gagné de haute lutte, etc. Henry est perdu dans ce monde mais il y a Junior ; quand il voit une éclaircie, il doit la saisir pour son fils, pour couper cette spirale contre laquelle il lutte depuis longtemps.
Petit à petit, touche par touche, ce roman vous prend à la gorge, vous révolte, vous peine, vous remue… Avec des mots simples mais de belles tournures, Guanzon, pour son premier roman, tape du poing sur la table branlante de l’Amérique des oubliés, des travailleurs pauvres, des rejetés hors de vue de peur que cela soit contagieux !
Une très belle lecture !
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