Dès le matin de mon arrivée, j’ai tout de suite senti que j’allais
m’emmerder sérieusement pendant les quatre prochains mois. Un boulot répétitif,
sans véritable compétence, ni même intelligence requises. Il suffisait juste de
rentrer des noms, des adresses, et des nationalités dans une base informatique
datant de l’âge de glace et de tirer sur des imprimantes bruyantes et
archaïques des étiquettes pour, enfin, Ô Joie !, les apposer sur un
dossier, des enveloppes de convocation et un listing.
Tout ceci sous la direction d’une chef de bureau qui était aussi
vieille que les imprimantes et avait, sans aucun doute, croisé un mammouth dans
sa vie ! Elle était en sus un brin (totalement ?) névrosée et
lunatique et cela donnait régulièrement des engueulades homériques entre elle et
les deux adjoints administratifs « titulaires et encartés ».
Mes collègues contractuels étaient là depuis plus de deux mois et
étaient à la limite du suicide collectif devant l’accumulation des tâches
répétitives, du bruit, de la fureur de la hyène (le doux surnom de la chef de
bureau) et du contrôleur principal qui refusait « tout jour de
congé » à des contractuels.
Churchill avait promis des « larmes et du sang »… Nous, on
avait tous les jours « les larmes ». Certaines de mes collègues
pleuraient tous les jours en arrivant et continuaient aussi le soir en partant.
Elles étaient au bout du rouleau et moi, j’étais effarée.
Ma propension à rebeller et ma grande gueule (autant dire, mon côte
chieuse) n’ont pas résisté longtemps à mon côté « jeune et polie ».
Dès la semaine suivante, la hyène a décidé de me faire plier. Elle m’a
pris pour cible et m’a demandé de venir plus tôt « à 7h30 au lieu de
8h30 » pour préparer « les dossiers » avec elle. Elle avait le
droit de changer mes horaires de travail car, sur mon contrat était stipulé
l’amplitude horaire « 7h30 – 20h ».
Elle m’a refilé tous les dossiers les plus mal écrits ou
indéchiffrables et me lançait régulièrement des « ça avance, oui ou
NON ?? » en hurlant. Au bout de deux jours, j’ai eu une envie de l’agrafer
à un dossier et j’ai commencé à me dresser contre elle. J’avais remarqué que
personne n’osait lui parler directement, droit dans les yeux. Même l’Inspecteur
principal ne la regardait jamais en lui parlant. « Elle a le bras long, tu
sais », m’avait un collègue à la pause déjeuner.
Quand un matin, elle m’a envoyé un dossier en pleine face, j’ai
calmement pris le dossier à terre et le lui ai renvoyé par la même voie
aérienne. En plein dans le nez ! Elle a hurlé, crié, et m’a demandé de
« sortir de ce bureau et d’aller à la DRH pour mon solde de tout
compte », mais je n’ai pas bougé. J’ai juste dit doucement :
-Et, ensuite, je vais à la médecine du travail pour faire établir un
certificat pour mon entaille à la joue dû à votre élégant lancer de
dossier ?
Elle m’a regardé et m’a hurlé de sortir de là
« salope ! ».
Je suis sortie et je suis allée directement voir le contrôleur qui
était atterré mais n’a rien dit. J’ai donc forcé la dose en accentuant la
minuscule entaille à la joue (due à un trombone dans le dossier) avec mon ongle
et j’ai foncé chez le médecin du service qui passait les visites médicales.
Cela n’a pris dix minutes avant que ce dernier exige mon
« transfert » dans sa partie en raison que « l’autre
pucelle » avait récupéré « un élément sachant lire, écrire et parler
normalement et surtout, capable de parler quelques langues étrangères ».
Mon intégration dans le côté « obscur » de la force était
entérinée dans la journée. La hyène a eu beau me présenter âprement ses
excuses, je suis restée dans mon nouveau domaine, mais j’ai dû aller aider mes
collègues de temps à autre…
Et croyez-moi, la hyène était sans cesse sur mes talons, cherchant la
moindre faille dans mon travail pour me faire virer définitivement.
A ce rythme, j’ai tenu
5 semaines de plus, avant d’avoir une nouvelle mission plus intéressante et 3 mois plus tard avoir la chance d’avoir un entretien d’embauche chez un avocat…
et un CDI dans la foulée.
Cet été : Chapitre 3 – Galerie de portraits (sociétés et administrations comprises) !
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