Saturday, March 28, 2020

[Humeur] Ce matin, à mon réveil...


Ce matin, à mon réveil (vers 6 heures du matin), j’ai fait ce que je fais quasiment tous les week-ends.

J’ai pris un thé (aujourd’hui un thé noir à la bergamote), j’ai enfilé une veste en laine hors d’âge (oui, il fait encore frais dans la cité phocéenne) et je suis sortie sur mon balcon, face aux marronniers.
J’ai toujours aimé ce moment ; ce temps suspendu quand la ville dort encore (et presque), que les voisins ne sont pas encore sortis, que les chiens n’aboient pas encore et que les voitures sont au garage.

Le Général Hux sur les talons, je me suis assise à la table de « jardin », j’ai ouvert le parasol (la météo annonçait 19° et plein soleil), j’ai posé ma tasse, et ai pris le chat en poids et l’ai mis sur le fauteuil et SON coussin de bébé chat. 

Il régnait un calme appréciable. Les tourterelles allaient et venaient déjà, préparant leurs nids dans les marronniers ; les mouettes voletaient en cercle sans faire de bruit (la mer est calme, donc). Le petit oiseau du matin (je vais le trucider un de ces jours !) sifflait à plein poumon (et, ce, depuis 4 heures du matin, à l’heure d’hiver !) et intriguait le Général Hux qui me regardait comme pour me demander : « mais il va gueuler longtemps le débile, on s’entend plus respirer ! »).

Bref, c’était un samedi matin, de bonne heure. Un matin ordinaire.

Soudain, j’ai été étonnée et j’ai dressé l’oreille : pas un bruit de fond. 

C’est quoi ce silence ?

Habituellement, malgré les arbres dans ma résidence, il y a ce fond sonore, lancinant, entêtant, ronronnant de la ville ; d’une grande ville. Entre sirènes des marins-pompiers, crissements de pneus des fêtards qui rentrent, portière qui claque, bus et son moteur qui démarrent bruyamment, le mec qui se croit encore en discothèque et qui roule, vitres ouvertes, la radio à fond, etc. 

Mais c’est quoi ce silence, merdus ? 

J’ai posé, naïvement, la question au chat : « hey, Huxounet, ils ont évacué la ville ou quoi ? »… - oui, ce n’est pas drôle, mais bon… je m’adressais à mon chat ! -. 

Et, soudain, mon cerveau, pourtant pas lent habituellement, s’est rappelé de la situation : un petit virus de merde a décidé de nous éradiquer, nous, les humains, les grands manitous de la Terre, ceux qui ont réduit en esclavage toutes formes jugées inférieures à l’être doté d’une cervelle et d’une langue bien pendue que nous sommes.

J’ai regardé l’oiseau qui gueulait toujours sur sa branche et je me suis surprise à lui dire qu’il avait bien de la chance d’être un volatile, libre ; car, contrairement à moi, il n’avait pas à avoir peur d’un minuscule germe avec un nom pathétique (coronavirus… covid-19… entre bière et science-fiction pour enfants), de serrer la personne qu’on aime dans ses bras, de claquer la bise à ses collègues de travail après un long week-end, de partager un bout de tarte avec sa meilleure amie (et de mettre, accessoirement, le doigt dans sa chantilly !), d’embrasser sur la bouche le joli garçon du bus (oui, et alors !), etc.

Un petit truc a décidé de réduire à néant des vies, des familles, des relations sociales. Il se propage un peu comme il le veut, le salopiaud !, grâce à un porteur hyper tactile, sympathique, papillonnant  partout, virevoltant d’un continent à l’autre en s’abrutissant de fuseaux horaires et d’images capturées sur un téléphone qui est devenu son principal ami : l’homme, nous, quoi !

Et là, sur le balcon, je me suis demandé comment les hommes en étaient venus à perdre le but du jeu d’une vie sur Terre : vivre en harmonie, avec les gens qui comptent pour nous et être heureux. 

Il y a des années (décennies, j’avoue) de cela, j’avais lu un article sur les cycles des civilisations et celle qui était la mienne était prévue pour un déclin vers 2020/2030 ; l’article était sûrement erroné à l’époque mais je me rappelle bien ce que j’en avais pensé : « 2030… pff, c’est hyper loin et l’Homme n’est pas si débile ! »…

Force est de constater que l’Homme n’a pas compris que toute civilisation est vouée à la mort, contrairement à la Nature. 

Car, au final, c’est comme un match de foot, à la fin, c’est toujours la Nature qui gagne… la grande, la petite ou la microscopique.

Alors, quand j’ai réalisé que ce silence était une symphonie un brin funeste pour une partie des hommes qui vivent sur cette jolie planète, j’ai pensé à tout ce que j’avais fait, j’avais dit, aurais aimé dire (ou pas), aurais aimé faire dans ma vie, avant cette pandémie. J’ai énuméré les voyages que je voulais absolument faire avant ma fin ; les objets que je voulais posséder ; les concerts auxquels je ne dérogerais pas (oui, je le redis, Blur n’est pas négociable), etc.

Et, là, l’oiseau hurleur a stoppé net son chant.

Quoi ? Pourquoi ?

Ce silence le gênait-il ? 

Non, son compagnon (ou compagne, cousine, mère, grand-mère, oncle, tante, amant, etc.) venait de se poser sur la branche et l’ébouriffait. Il piaillait avec plaisir de l’avoir surpris en plein récital. 

J’ai pris mon café, mon chat, mon livre (que j’ai dû mal à lire en ce moment ; tu m’étonnes, la fille qui lit, à nouveau, le Régime de Vichy… bravo !) et je suis rentrée à l’intérieur ; j’ai pris de plein fouet l’ambiance anxiogène de ce silence ; pourtant, je suis habituée à cela, je viens de la campagne, d’un village où l’on n’entend rien d’autre que les oiseaux, les tracteurs, les cloches, les chiens, les chats, et quelques voitures… je suis une fille d’intérieur, je ne m’ennuie jamais avec moi-même, un peu solitaire (trop), parfois.

Alors, j’ai saisi mon précieux MP3 et j’ai enclenché la première chanson sur le mode aléatoire… j’allais lui en donner du bruit, moi, à ce silence !

C’était « Outro »de M83… ma chanson dopante, celle qui, au plus fort du stress, me calme et me motive à la fois. 

J’ai mis le son plus fort afin de couvrir la tourterelle qui s’amusait à gueuler sur son conjoint arrivé sans la branche parfaite pour le nid (oui, non, parce que son mec, c’est une plaie !) et j’ai couvert le silence…

A la fin de la chanson, la suivante (The Universal de Blur) m’a remué le cœur, comme d’habitude… 

 

Je me suis dit qu’au final, si tout devait s’arrêter là, maintenant, le moindre moment sur cette Terre avait valu le coup… 

Silence ou pas.

Faites attention à vous.



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