Reinhard
Heydrich, militaire déchu, se tourne vers le régime nazi par le biais de sa
femme Lina. Il monte vite les échelons, devient le bras droit d’Himmler, chef
de la gestapo et prend le commandement de la Bohême-Moravie. Il devient
également l’architecte de la solution finale. Face à lui, deux jeunes soldats,
le tchèque Jan Kubiš et le slovaque Jozef Gabčík se sont engagés au côté de la Résistance. Ils se sont
portés volontaires pour éliminer Heydrich. Au cours de l’infiltration, Jan
rencontre Anna Novak, dont il tombe amoureux. Le 27 mai 1942, Jan et Jozef
entrent en action...
Basé sur le roman éponyme de Laurent Binet, Goncourt du
premier roman en 2010, le film de Cédric Jimenez prend le parti de ne pas
évoquer le côté fiction/réalité avec lequel l’auteur avait jonglé.
Le film suit dans la première partie, l’ascension d’un homme
somme toute ordinaire, bien guidé par son épouse, et le dépeint comme un homme marié,
bon père, violoniste, sportif, qui devient, entre ambition et immoralité, le
fer de lance de la Solution Finale et « le boucher de Prague ». Puis,
dans la deuxième partie, on découvre deux jeunes gens, parachutistes, qui se
dressent devant l’ambitieux et glaçant numéro trois du régime nazi, bien
décidés à mener à terme l’opération « Anthropoïd », nom de code de la
« mission visant à assassiner le Général SS Reinhard Heydrich ».
Il est bon de rappeler à ce stade que HHhH signifie « Himmlers Hirn heißt Heydrich »,
littéralement « Le cerveau d’Himmer s’appelle Heydrich », surnom
donné par les SS, admiratifs, à Heydrich.
Premier film en langue anglaise du réalisateur, Jimenez
réunit un beau casting, avec en tête de gondole, l’excellemment glaçant Jason
Clarke qui endosse l’uniforme avec toute la raideur et l’inquiétant regard du
futur patron du RHSA (Office
central de la sécurité du Reich). A ses côtés,
Rosamund Pike incarne une femme ambitieuse et forte qui disparaît hors champ
petit à petit ; On note aussi la présence de Jack O’Connell (la star
montante) et Jack Reynor (vu dans Sing Street) pour incarner les deux
parachutistes le tchèque Jan Kubiš et le
slovaque Jozef Gabčík, dont le sacrifice et la mission
paraissaient à la fois immense et impossible.
Le film est réellement scindé en
deux parties : l’une dépeint donc Heydrich, son désir de pouvoir et de
grandeur, son cynisme, et ce mal absolu qui apparaît devant nous, l’autre, l’héroïsme
d’une mission capitale, mais suicidaire, pour deux jeunes soldats bien décidés
à éliminer « la tête blonde ».
Je dois avouer que la partie
relative à Kubiš
et à Gabčík est bien plus
passionnante que la première, Non pas
que montrer le monstre derrière l’homme ne soit pas intéressant, mais cela a déjà
évoqué dans d’autres œuvres. Jimenez montre que les abymes de l’un renforcent
l’héroïsme des autres.
Leur courage, leur bravoure et
cette détermination à éliminer le chef des services secrets et vice-Protecteur
du Reich en Bohême-Moravie (l’ancienne Tchécoslovaquie) ne peuvent pas être
édulcorés. Cette page de l’Histoire, marquante pour les Tchèques, qui amena de
sévères représailles nazies (presque cinq cents morts et un village, Lidice,
rayé de la carte) est un tournant de la résistance et de l’Histoire quand on
sait qui était Heydrich et de quoi il était et fut capable.
Jimenez impose également des
couleurs plus vives à l’écran ce qui peut être perturbant mais ne s’éloigne pas
d’un certain sens du réalisme.
Pourtant, HHhH semble avoir
problème au niveau du montage et du récit, et possède quelques longueurs en
milieu de film, nonobstant le jeu effrayant et saisissant de Clarke. Il manque pareillement
de l’émotion dans l’évocation des deux résistants.
Néanmoins, ce film, rude mais
captivant, comme les dernières parutions sur le sujet (Le Labyrinthe du
Silence, Elser, Fritz Bauer, etc.)
permet d’évoquer un pan de l’Histoire moins connu du grand public, d’une
manière moins difficile que les longs et fastidieux documentaires, ou les pavés
de 800 pages qui trônent sur mon bureau.
Il est à noter encore qu’un autre
film récent, non sorti en salles, mais uniquement en V.O.D. et DVD, existe. Il
s’appelle « Anthropoïd », réalisé par Sean Ellis, et est centré sur
l’opération elle-même avec au générique Cillian Murphy, Harry Lloyd, Jamie
Dornan et Charlotte Le Bon. Tourné à Prague avec des comédiens du cru (dont Detlef Bothe
impressionnant de ressemblance avec Heydrich, dont il avait déjà porté les
traits dans un film sur Lidice), et une
historienne spécialisée sur le plateau, ce film vaut également le visionnage
même si les critiques ont fusé à sa non-sortie !
Pour en savoir plus relisez HHhH de Laurent Binet ou encore visionner les documentaires sur l’opération
elle-même (ou contacter l’auteur du texte !).
Réalisateur :
Cédric Jimenez
Avec :
Jason Clarke, Rosamund Pike, Jack O’Connell, Jack Reynor, Mia Wasikowska,
Volker Bruch, Céline Sallette, Gilles Lellouche, etc.
Durée:
120 mn
Sortie
7 juin 2017
No comments:
Post a Comment
N'hésitez pas... tous les auteurs aiment les commentaires....