Dans les
festivals, vous croisez plein d’auteurs et ça papote, ça refait le monde et ça
glousse toute la journée…
Quelque fois,
cela se fait des grands sourires d’un côté à l’autre du trottoir avec des clins
d’œil hilarants et des « Ah, le
temps se couvre » (client chiant) ou « Les abeilles attaquent » (des enfants chiants). Nous avons
tous les mots de passe, nos regards-qui-tuent-mais-veulent-dire-un-truc et nos
moments de soupirs coordonnés.
Cela est
toujours intéressant de se frotter aux regards des lecteurs, qui se baladent
tranquillement sous vos yeux.
Bon, il faut
l’avouer, nous avons un peu l’impression d’être des marchandises livrées en
pâture aux lions (ou des objets exposés en vitrine, voire plus si
affinités !).
Cela n’est
guère aisé de rester stoïque devant le regard des passants qui jaugent votre
travail sur la présentation de votre stand (table, strapontin, etc.) ou à la
simple vision de votre première de couverture. Ils passent nonchalants, parlent
souvent de tout autre chose avec leur compagnon de promenade, engueulent les
enfants, s’irritent de leurs patrons, et vous regardent ostensiblement comme du
bétail.
On peut
imaginer les expressions qu’ils se disent à la simple vision de notre sourire
béat :
- - Tiens, elle/il a une tête sympa, mais le titre de l’ouvrage c’est illisible.
- - Elle/il n’a pas une tête à écrire ! on dirait un travelo !
- - Ah ouais, quand même, cinq volumes des aventures de truc machin, ça bosse un auteur !
- - Mais elle/il a l’air tout jeune celle/celui-là… Elle/il ne doit pas être sérieuse !
- - Les aventures de Truc Machin ont trouvé éditeur ! C’est dire le niveau de la littérature française de nos jours !
- - Elle/il semble sorti(e) de la naphtaline ! Mais quelle horreur ce chapeau !
- - Ces artistes ! Tous des prétentieux !
- - Un café, Mademoiselle ?
- - Quel beau garçon, merdus !
- - Il/elle va bien finir par rendre l’âme !
Cependant, les plus belles
rencontres ne sont pas celles qui durent le plus longtemps, ou qui ont ouvert
une discussion éminemment intelligente ; Non, celle que l’on retient
souvent, ce sont celles des personnes timides, qui s’avancent un peu comme à
l’échafaud, persuadées souvent, à tort, que les auteurs sont de divins
prétentieux qui aiment s’écouter parler pendant des heures pour vanter leurs mérites
et leurs faits d’arme !
Celui qui s’avance, doucement, en
souriant, semble humer le stand, ouvre timidement les livres d’exposition, les
regarde, les touche, feuillète quelques pages, en essayant de regarder votre
réaction, lit la quatrième couverture et s’en va.
Puis, après avoir promené dans
les allées, revient et vous demande si vous pourriez lui dédicacer
« celui-là ». Pas un autre, le modèle d’exposition, celui qu’il a
touché.
Et là, souvent, c’est vous qui
êtes touché(e). Car, apporter tant de douceur dans le choix d’un livre, a
fortiori le vôtre, c’est plus que de la délicatesse, c’est du respect pour
l’auteur et son « œuvre »
(oui, oui, je sais, ce n’est pas la modestie qui l’étouffe !).
Il est tellement trognon ce
lecteur que la dédicace prend dix minutes (au lieu des deux minutes
réglementaires après entretien bref et personnalisé, sinon, ce n’est pas du
jeu !) car qu’écrit-on à un garçon délicat ?
Alors, on pioche dans la seule
phrase prononcée sans être inaudible ; A défaut, on capte un détail sur
son t-shirt (ce qui m’est arrivé récemment ! Il portait un t-shirt
arty-punk « God Save the Queen ») et on brode deux belles lignes pour lui
faire plaisir !
Il sourit, on sourit, il part et
on soupire pendant vingt minutes, avec l’air d'une Joconde sous valium…
C’est ça aussi être un auteur en
dédicace…
A suivre…..
No comments:
Post a Comment
N'hésitez pas... tous les auteurs aiment les commentaires....