Ce
texte est sûrement le plus difficile et le plus simple à écrire à la fois et
aussi le plus intime. Mais l’hommage me semble fondamental mais là n’est pas la
finalité de ce papier.
Il
me semble évident que parmi les personnes les plus importantes de ma vie
figurent aux quatre premières places mes grands-parents.
Viendront
ensuite d’autres personnes proches de moi (oui, oui, y compris mes parents) et
la liste ne tiendra largement que sur deux mains.
Mais
quand on en vient à me demander quelle est la seule personne qui a eu, a et
aura toujours une influence sur ma vie, je n’hésite jamais : ma grand-mère
maternelle.
J’ai
souvent tendance à dire, nonobstant la relation que j’entretiens avec ma mère,
que lorsque j’ai perdu ma grand-mère maternelle, je suis devenue orpheline.
En
fait, j’ai surtout perdu ce petit bout de moi qui n’appartenait qu’à elle, et
qu’elle savait manœuvrer élégamment afin que je ne me fasse pas trop mal.
Elle
était tout simplement la seule personne à qui je faisais une confiance aveugle et,
par-là, à qui je pouvais tout confier. Je n’ai jamais été le genre à faire
confiance (surtout question de pudeur, dans mon cas) et je suis toujours un brin méfiante en continu (cela vire largement
à la parano, je vous le dis !), mais jamais avec elle.
Elle
était ce que je dis souvent : « Ma
lumière dans tout ce noir ».
Tout
paraissait simple, évident et nettement plus abordable avec elle à mes côtés.
Tout
obstacle n’avait aucune importance tant que je savais vers qui me tourner pour
un conseil, un mot, un regard, ou même une pensée.
Tout
me semblait si naturel et facile que cela a rendu ma vie assurément plus douce
et légère pendant trente-cinq ans.
Pourtant,
nos coups de gueule étaient aussi légendaires qu’exceptionnels. Notre
différence d’âge (presque soixante ans) n’avait pas d’influence sur notre
vision du monde ; Plus sûrement parce qu’elle m’avait façonnée à son
image : insubmersible et loyale envers ses croyances et son instinct.
Et
que sa vision du monde était sans cesse renouvelée par sa propension à accepter
et à tolérer la modernité. Elle avait vu les premières voitures, les premiers
avions, nourrissait une passion pour l’explorateur Paul-Emile Victor, rêvait de
marcher sur la lune, mais, elle était surtout quelqu’un avec qui parler, de
tout, et d’une compréhension incroyable.
Même
si elle n’approuvait pas, elle ne jugeait rien. Elle essayait d’apporter sa
vision et son avis avec douceur et fermeté.
Une
main de fer dans un gant de velours : l’expression lui convenait
parfaitement.
Dire
qu’elle m’a apporté l’amour et la confiance qu’il fallait à une petite fille
est largement en-dessous de l’impact qu’elle a eu sur moi.
J’ai
la nette impression que je suis, à quelques détails près, un clone avec ce
caractère trempé, ce côté « général
en chef des forces armées », ce côté « contrôle de soi et compagnie », et, heureusement, ce côté
bohème, véritable marque de fabrique de sa famille. Un côté artiste,
excentrique sans trop l’être, avec ce qu’il faut de droiture et de vertu pour, harmonieusement,
contrebalancer l’ensemble.
Je
n’ai malheureusement pas hérité de son côté rassembleur et sociable. On ne peut
pas tout avoir !
Elle
était de celle qui régissait la vie des autres afin d’éviter tout problème mais
elle le faisait souvent, hélas, au détriment de certaines personnes qui se sont
laissées porter par sa volonté sans faille.
J’étais
une des rares à la défier sur son propre terrain et à refuser le diktat
familial et les nombreuses exigences. Je refusais de me soumettre à certaines
convenances et, malgré nos heurts sans conséquence (le câlin du lendemain matin
le prouvait), cela l’amenait à s’ouvrir davantage et entrevoir une autre vision
de la vie.
Ses
blessures, les épreuves et la vie qu’elle a endurées avaient fait d’elle un
être fort, intègre et loyal. Elle était mon phare dans la tempête et a souvent
ramé à mes côtés pour me maintenir à flot et éviter tout écueil.
Effectivement,
la vie est moins douce et moins aisée depuis 2005, mais, cependant, je la sens
souvent dans mes actes et je sais qu’elle m’a transmis ce pouvoir de faire
face. Je n’ai, néanmoins, pas encore acquis le recul et le calme qu’elle
affichait, mais j’y travaille.
« Avoir les épaules pour » me
disait-elle. « Le plus important
pour une femme c’est l’indépendance financière et avoir les épaules
suffisamment larges pour tout encaisser sans l’aide de personne ».
Ce
n’est pas difficile à faire mais nettement moins amusant sans elle.
A
toi, pour toujours, et à jamais, Winnie.
t'es vraiment géniale, Lisa... Elle doit être fière...
ReplyDeleteCheerio Lila