La
première de la comédie musicale Wonder.land avait lieu le mardi 7 juin dernier
au théâtre du Chatelet, dernière création du musicien britannique, Damon Albarn,
et du metteur en scène Rufus Norris.
Après
avoir été présentée sur les scènes de Manchester et Londres, avec plus ou moins
de succès, le théâtre du Chatelet accueillait donc le musical conçu par Damon
Albarn, Moira Buffini et Rufus Norris.
Inspiré
par Alice aux Pays des Merveilles et De l’autre côté du miroir de Lewis
Carroll, cette co-production du Manchester International Festival et du National
Theatre of Great Britain, revisite l’histoire d’Alice en la propulsant dans le
21e siècle et l’ère virtuelle.
On
découvre alors Aly, jeune fille mal dans sa peau, en plein désarroi suite à la
séparation de ses parents et à la naissance d’un petit frère, qui la pousse à
se sentir délaissée, et qui se sent isolée à l’école. Harcelée par trois
camarades de classe, en rupture avec sa vie réelle, elle se réfugie dans le
monde virtuel, grâce à son Smartphone, du site Wonder.land, site qui vante de vous transformer en
« exactement qui vous voulez être » ;
Son avatar créé à l’opposé de ce qu’elle pense être - son Alice est grande, mince, blanche, blonde, sûre d’elle –, Aly plonge
dans cet univers parallèle pour s’échapper de ses problèmes. Là, dans ce
wonder.land, elle croise le lapin blanc, un Dodo, des jumeaux, une chenille, un
chat et la reine de cœur, qui dans la vie réelle est le tyrannique proviseur de
son école, et dans le virtuel est une reine de cœur complétement barrée.
L’histoire
oscille entre le virtuel, ses bienfaits, ses pièges mais aussi la possibilité de
création infinie, et la réalité d’une vie ordinaire, rythmée par les disputes
des parents, des brimades de ses camarades, du mal-être d’une adolescente, mais
toujours de l’amour et de la solidarité etc.
Cette
comédie pop se base sur cette phrase importante « qui es-tu ? »
qui pourrait ouvrir la discussion sur cette réflexion de Montaigne qui
expliquait qu’il fallait se connaître soi-même.
Cet
univers se crée autant musicalement, par les arrangements pop enjoués de Damon
Albarn, que visuellement avec, tout d’abord, les costumes mêlant la Renaissance
pour la fraise inversée de la jupette d’Alice à la technologie moderne des
oreilles « gélules » du lapin.
Pourtant,
le point fort est, sans aucun doute, la scénographie et les hologrammes :
l’apparition du chat, d’une Alice suspendue, dansante, dans un décor coloré, tourbillonnant,
fluo, pop et grandement féérique. Chaque
tableau, même les plus sombres, est imaginatif, envoûtant et intelligent, appuyé
par un propos habile qui ne dénonce rien mais constate justement la société
actuelle.
C’est
bourré d’idées et tout se finit dans un combat à la manière d’un jeu vidéo. Les
uns gagnant la maturité, les autres perdant la tête.
Malgré
une ou deux scènes en deçà, les répliques sont piquantes, percutantes, avec une
pointe en français, petit clin d’œil de la troupe, avec un humour délirant et
une joie communicative. En effet, la troupe est survoltée ; ça danse,
chante, court à une vitesse jouissive. Les décors s’alternent sans temps mort,
toujours promptement amené par d’habiles montages et trucages.
Rien
ne vient assombrir la magie de ce musical qui tient plus du music-hall que de l'opéra rock !
En effet, il faut souligner que le terme « rock » apposé sur la
promotion peut être trompeuse car certains spectateurs s’attendaient à plus de guitares !
Ici, tout est pop, classique, très britannique.
En
sus, le théâtre du Chatelet a offert un quatuor de cordes à l’ensemble qui n’était
pas présent en Angleterre ! Un plus non négligeable.
Encore
une production du divin anglais, Damon Albarn, venu saluer le public en fin de spectacle,
lequel s’est levé comme un seul homme pour ovationner l’ensemble de la troupe
et le musicien, ému.
Petit
conseil : N’oubliez pas de regarder ce spectacle avec des yeux d’enfant et
avec la première impression de lecture que l’on a eue pour Lewis Carroll.
Casting :
Hal Fowler, Lois Chimimba, Golda Rosheuvel, Paul Hilton, Abigail Rose, Carly
Bawden, Anna Francolini, etc.
Musique
et orchestration : Damon Albarn
Livrets
et paroles : Moira Buffini
Mise
en scène : Rufus Norris
Décors :
Rae Smith
Représentations
: 7,8, 9, 10,11, 14, 15 et 16 juin à 20h / 11 et 12 juin à 15h et 16h
Durée
du spectacle : 2h20 (dont 20 minutes d’entracte).
Exposition
« pop-ups in Wonderland » : visible à l’entracte proposant des livres
animés issus de collections privées, au niveau de l’orchestre, de la corbeille
et du 1er balcon.
Lieu :
Théâtre du Chatelet, Paris.
Crédits photos : Raymond Delalande/SIPA - wonder.land © Brinkhoff Mögenburg /Bitchimj et clemitraillette pour les photos de Damon sur scène (l'auteur de ce papier étant trop occupée à soutenir vocalement la standing ovation ! On ne se refait pas !).
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