Pour certains, effacer le passé semble (et ressemble) à un devoir de mémoire. Pourtant, rien n’est plus hideux qu’un monde sans passé.
J’entends bien que le passé est le passé et que l’avenir est le seul mot qui soit important. Mais, à mon humble avis, le seul qui vaille encore le coup est : présent.
Dans le présent, il faut une dose de passé pour pouvoir entrevoir l’avenir. Sans passé, rien ne peut réellement être présenté décemment.
De nos jours, pourtant, tout y passe, on écrase les fichiers, on détruit les papiers, on jette les documents, on oublie les noms, on découpe les pièces… Du passé, faisons table rase !
Je m’insurge contre cette manière de traiter les anciens (tableaux, papiers, gens, etc.) et je n’adhère pas à cette politique.
Je suis pourtant largement heureuse de vivre dans mon époque. Même si certaines autres, pour des raisons purement historiques et mélancoliques, m’auraient attirées, je ne regrette rien. La condition féminine étant ce qu’elle est de nos jours, je suis grandement mieux adaptée à cette vie plutôt à celle de mes arrière-grands-mères.
Cependant, je n’oublie pas le passé et j’aime ce sentiment d’appartenance. Il coule dans mes veines suffisamment de couleurs, de culture et d’amour pour que je n’occulte pas l’antériorité de mon histoire.
Cela est pareil pour l’histoire d’une ville, d’un pays, d’une entreprise. On ne peut pas gommer les personnes nous ayant précédé uniquement par narcissisme, orgueil, vantardise ou même stupidité.
Il nous faut perpétuer l’histoire et l’Histoire. Cheminer vers l’avenir avec les acquis des anciens.
L’Histoire n’est pas d’un agrégat de vieux papiers, de vieux récits ou d’inepties de « vieux ». Le devoir de mémoire est fondamental pour ne pas oublier, pour ne pas reproduire et pour se sentir libre des droits obtenus tout au long des siècles.
Dernièrement, l’effacement d’un bout d’Histoire décroché d’un mur m’a profondément révolté. Non pas que cela me touchait directement (je ne collectionne pas les plaques commémoratives… pas encore !), mais j’estimai, sur le moment, que cela manquait d’un certain sens du souvenir collectif.
Le fait de la vanité d’un homme ne doit pas occulter ses prédécesseurs, ni tenter de masquer le côté communautaire d’une œuvre, quelle qu’elle soit (architecturale, historique, artistique, etc.). Cette volonté de dissimuler la trace d’une existence est parfaitement immorale.
Nous ne sommes que de passage et notre trace dans l’Histoire ne sera pas plus distinctive dans quelques années (quelques décennies ?) que tous ceux qui nous ont précédés et qui ont été les témoins de l’Histoire.
Tous ces oubliés des livres et des légendes, ceux qui ont donné leurs vies, leurs âmes, leurs idéaux pour voir un seul homme arriver à changer une once de terrain qui a fait que nous en sommes là aujourd’hui.
Sans toute cette Histoire et leurs histoires, nous ne pourrions pas imaginer l’avenir avec tout le recul, l’envie et l’excitation que nous ressentons aujourd’hui.
Alors, un nom sur une plaque n’est pas synonyme de passé et d’échec, mais relève plus de la reconnaissance, plus ou moins avérée dans certains cas, du groupe envers ceux qui étaient en tête sur le champ de bataille.
A choisir un camp, j’aurais largement préféré celui de la collectivité plutôt que le commandement, car je n’ai aucune ambition, ni vanité, à être marquée dans le marbre.
J’estime que nous sommes tous une pierre apposée sur les fondations de l’humanité et que nous ne sommes, donc, à ce titre, que des petits personnages nécessaires pour ceux qui viendront après coup.
L’Histoire est équitablement belle quand on y prête attention et quand on ne veut pas la revisiter avec le regard contemporain.
Il faut laisser les erreurs et les bravoures dans leur contexte, et surtout, ne pas vouloir influencer l’avenir en effaçant les fautes des anciens.
Il faut juste apprendre et appréhender l’Histoire, pas la réinventer, ni l’interpréter.
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